mardi 29 décembre 2015

Lettre ouverte à Monsieur le Consul de l'Inde à la Réunion

Monsieur le Consul,

Vous allez bientôt inaugurer à Saint-Denis aux côtés de Monsieur le Ministre indien de la culture, du tourisme et de l'aviation civile et de Monsieur le préfet de la Réunion une stèle à la mémoire des ancêtres indiens des Réunionnais.

Je souhaite d’abord la bienvenue, sur notre sol réunionnais, à monsieur le ministre.

Je tiens quand même à vous rappeler monsieur le Consul que bien avant l'arrivée des engagés indiens à la Réunion en 1849, Il y a eu d'autres vagues migratoires indiennes qui se sont fondues petit à petit dans le métissage Kréol et sont au fondement de notre identité kréol, de notre « batarsité », de notre « réyonèzté » .

- Première vague migratoire indienne depuis 1685 : à côté des « Indo portugaises », des esclaves et des engagés sont répartis sur toutes les habitations et les grands domaines esclavagistes de l'île.

- Deuxième vague migratoire indienne : après l'abolition de la traite (1817), au début des années 1820 arrivée dans l'île d'une nouvelle main-d'oeuvre engagée.

- Troisième vague migratoire après « l'abolition de l'esclavage », de 1849 à 1884. En 1848 il y a déjà plus de 3000 Indiens environ à la Réunion.

La vérité historique, quant au peuplement de notre île, voudrait que l'on s'intéresse non seulement à la troisième vague migratoire indienne certes beaucoup plus importante en nombre, mais aussi à toutes celles qui l'ont précédé dans le temps et qui ont contribué à façonner notre réalité et notre culture réunionnaise.

Je suis moi-même monsieur le Consul, un descendant fortement métissé comme la plupart des Réunionnais de cette première vague migratoire indienne composée d'esclaves et d’engagés. Je suis kréol ,je suis réunionnais et je suis fier de mes ancêtres indiens esclaves affranchis ou engagés qui à côté de mes autres ancêtres (bretons, malais, malgaches, africains…) ont fait ce que je suis aujourd'hui. Ils ont, dans l'arrachement, le déracinement et la souffrance dans un système inique, été les «Zarboutans » de ma Kréolité et de mon identité réunionnaise inaliénable à aucune autre.

En espérant que vous voudriez bien accepter ces quelques remarques de ma part, veuillez agréer Monsieur le Consul l'expression de mes salutations les plus distinguées.

Jean Michel Lucas

lundi 28 décembre 2015

M. Le recteur de l'académie la Réunion: assez!

Dans un interview donné au JIR du 29 janvier 2015, monsieur le recteur déclarait: « l’une des conséquences de grands temps de vacances c'est 115 000 illettrés à la Réunion…» !!!

Marre! Marre, d'entendre des fonctionnaires ultra-marins de passage dans notre île pour de courtes périodes, nous donner des leçons et se lancer dans des analyses alambiquées sur les prétendues causes de l'échec scolaire ou de l'origine de la persistance de l'illettrisme dans notre île. Monsieur le recteur, la cause de la persistance de l'illettrisme n'est certainement pas à chercher dans les deux mois de vacances de janvier et février, mais plutôt dans les contradictions d'une politique éducative molle qui n'a jamais pris réellement en compte la langue maternelle, la culture et le vécu de l'enfant réunionnais.

Les classes bilingues, excellente initiative, font figure d'exceptions. Les parents, les enseignants connaissent peu ce dispositif intéressant qui prend en compte les réalités du terrain et permettent de lutter contre l'échec scolaire. En collège et en lycée, les cours de langue et culture régionale connaissent les plus grandes peines pour d'abord exister, se développer et ensuite s’intégrer au système scolaire. Le mot d’ordre de l'école à la Réunion reste encore : pas de place pour le créole et la culture réunionnaise dans le système éducatif. Jusqu'à quand cet ostracisme néocolonial qui porte atteinte à la dignité de l'enfant et du futur homme réunionnais? Jusqu'à quand ce manque de respect flagrant pour ce que nous sommes? Oserez-vous, monsieur le recteur, tenir de tels propos dans une académie de Bretagne, d'Alsace ou de Corse ?

Mme Sylvie Wharton, enseignante chercheur en sciences du langage, reprenant à son compte en 2003 les principes du chercheur nord American Cummins (1978), soulignait que là nécessaire mise en confiance de l'enfant à l'école est liée au développement d'attitude positive envers sa langue et sa culture d'origine et l’acquisition d'un seuil minimum de compétences dans sa langue maternelle comme les gages d'une meilleure réussite scolaire, des propos confirmés par des chercheurs en psycholinguistique .

De plus dans quel pays au monde avez-vous vu des enfants travailler pendant les mois les plus chauds et les plus difficiles (forte chaleur, fortes pluies, cyclone) et se reposer pendant les mois les plus frais ? Le système éducatif en vigueur dans cette île prend-il en compte réellement les intérêts véritables de l'enfant réunionnais ou plutôt les directives d'une politique assimilationniste néocoloniale.

La réalité est têtue et le monde commun de l'hémisphère nord ne peut pas correspondre intégralement à celui de l'hémisphère sud dans lequel nous vivons…

Une lapalissade, n'est-ce pas monsieur le recteur !

Lucas Jean-Michel

Professeur de philosophie à la retraite
Heureux d'avoir recouvré en même temps que ma mise à la retraite sa liberté entière de parole, celle d'un citoyen réunionnais lambda réaliste et fier de son histoire, de sa culture et de son identité.

Ouverture du blog

Fin 2015, je me décide à ouvrir un blog, ouvert à toutes les bonnes volontés qui défendent la Kréolité Maskarin, nout lanmayaz produit de notre histoire  sur cette île de la Réunion.
N'hésiter pas à me contacter ou à me laisser vos commentaires.
Ni artrouv !  

Nanou Lucas